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L’analyse innovante de la jurisprudence administrative quant à l’imposition des gains de joueurs de poker

Auteur : Julien CHARRE
Publié le : 24/03/2017 24 mars mars 03 2017


Les gains réalisés à l'occasion de jeux, même pratiqués de manière habituelle, ne constituent pas, au sens de l'article 92 du code général des impôts, une occupation lucrative ou une source de profits devant donner lieu à imposition.
 
Néanmoins, de jurisprudence constante, les gains des joueurs de poker sont une source de profit devant donner lieu à imposition (Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, 21 octobre 2010, Petit, n° 09-640question au gouvernement n°110952 du 14 juin 2011, JOAN du 15 novembre 2011 - Tribunal administratif de Paris, 25 novembre 2015, n°1428971/1), dès lors que le poker ne peut être regardé comme un jeu de pur hasard puisqu’il s’exerce dans des conditions permettant de supprimer ou d'atténuer fortement l'aléa normalement inhérent aux jeux de hasard.
 
La doctrine publiée de l'administration fiscale confirmait cette analyse en précisant que les gains réalisés par les joueurs professionnels de poker sont imposables au titre de la catégorie des bénéfices non commerciaux, « sous réserve qu'il soit exercé dans des conditions assimilables à une activité professionnelle ».
 
Dans un arrêt du 7 février 2017, la cour administrative d’appel de Paris a retenu une approche innovante sur la problématique.
 
Après avoir rappelé que le poker ne rentre pas dans la catégorie des jeux de hasard :
 
« si le jeu de poker fait intervenir des distributions aléatoires de cartes, un joueur peut parvenir, grâce à l'expérience, la compétence et l'habileté à atténuer notablement le caractère aléatoire du résultat et à accroître de façon sensible sa probabilité de percevoir des gains importants et réguliers » (CAA Paris, 7 février 2017, n°16PA0035).
 
La Cour en conclut :
 
« que, par suite, dès lors qu'une personne se livre à une pratique habituelle de ce jeu dans l'intention d'en tirer des bénéfices, lesdits bénéfices doivent être regardés comme tirés d'une occupation lucrative ou d'une source de profits au sens des dispositions de l'article 92 du code général des impôts, et imposables en application de cet article ».
 
Ainsi, alors qu’il était auparavant nécessaire que la pratique du poker soit exercée dans des conditions assimilables à une activité professionnelle, pour que les gains soient imposables ; désormais seule une pratique habituelle semblerait désormais requise.
 
Au cas d’espèce, la Cour a conclu que le requérant devait être regardé comme pratiquant habituellement le jeu de poker :
 
« Considérant, enfin, qu'il est constant que M. B...a régulièrement fréquenté, entre 2007 et 2011, le cercle de jeux de l'Aviation Club de France, et a tiré de cette pratique, au titre de la période vérifiée, des gains réguliers et conséquents ; que selon ses propres indications, il a joué environ 150 jours par an en moyenne sur la période couvrant les années 2008 à 2011 ; qu'en outre, il a participé à des tournois recensés sur un site internet spécialisé, à l'issue desquels il a été classé, et a réalisé des gains importants ; qu'il a également conclu un contrat dit " de sponsoring " avec la société SAS LB Poker en 2010, renouvelé en 2011 et comportant le remboursement de frais de tournois et une rémunération qu'il a déclarée dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'il n'a perçu aucun revenu professionnel pendant les deux années en cause, à l'exception, en 2009, de sommes reçues en rémunération de l'animation de soirées durant les tournois de poker pour un montant déclaré de 2 071 euros, et en 2010, de sommes versées en exécution du contrat de sponsoring susmentionné ; qu'il a d'ailleurs lui-même reconnu en 2009 jouer professionnellement au poker depuis trois ans et demie ; que, dans ces conditions, eu égard au caractère habituel de cette activité génératrice de revenus importants, et alors même que l'intéressé n'aurait participé qu'à sept tournois au cours des années concernées, que d'autres joueurs auraient des revenus très supérieurs, et que les opérations de sponsoring du type de celle en cause seraient des opérations publicitaires réalisées par les sponsors, M. B...doit être regardé comme ayant exercé, au cours des deux années en cause, une activité lucrative de joueur de poker lui procurant des profits réguliers imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en application de l'article 92 précité du code général des impôts ».

L'arrêt de la Cour : 

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