Vers une mise en concurrence des conventions et autorisations d'occupation du domaine public
Auteur : Marie BERTRAND
Publié le :
02/06/2017
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Une ordonnance n°2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété publique est venue modifier le code la propriété des personnes publiques et notamment instaurer une obligation de publicité et de mise en concurrence.
En effet, jusqu’alors, les personnes publiques n’étaient jamais tenues d’organiser une procédure de publicité et de mise en concurrence pour l’attribution d’une autorisation d’occupation d’une dépendance de son domaine public (CE, 3 décembre 2010, n°338272, 338527, Ville de Paris - Association Paris Jean Bouin).
Alors même que les dépendances du domaine public peuvent être un lieu convoité en raison de leur caractère commercialement attractif (terrasse, littoral, berges …), de telles conventions échappaient encore aux exigences de la libre concurrence.
Par un arrêt du 14 juillet 2016, n° C-458/14 et C-67/15, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a posé indirectement un principe de soumission quasi-systématique des autorisations et concessions d’occupation du domaine public permettant l’exercice d’une activité économique, à une procédure de sélection des candidats.
Cette nouvelle ordonnance prend ainsi acte en droit interne des exigences du droit communautaire.
Un nouvel article L.2122-1-1 est introduit dans le code général de la propriété des personnes publiques pour ce faire :
« Sauf dispositions législatives contraires, lorsque le titre mentionné à l'article L. 2122-1 permet à son titulaire d'occuper ou d'utiliser le domaine public en vue d'une exploitation économique, l'autorité compétente organise librement une procédure de sélection préalable présentant toutes les garanties d'impartialité et de transparence, et comportant des mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester.
Lorsque l'occupation ou l'utilisation autorisée est de courte durée ou que le nombre d'autorisations disponibles pour l'exercice de l'activité économique projetée n'est pas limité, l'autorité compétente n'est tenue que de procéder à une publicité préalable à la délivrance du titre, de nature à permettre la manifestation d'un intérêt pertinent et à informer les candidats potentiels sur les conditions générales d'attribution. »
Lorsque l'occupation ou l'utilisation autorisée est de courte durée ou que le nombre d'autorisations disponibles pour l'exercice de l'activité économique projetée n'est pas limité, l'autorité compétente n'est tenue que de procéder à une publicité préalable à la délivrance du titre, de nature à permettre la manifestation d'un intérêt pertinent et à informer les candidats potentiels sur les conditions générales d'attribution. »
L’instauration d’une obligation de publicité et de mise en concurrence reste toutefois limitée au cas d’occupation du domaine public en vue d’une exploitation économique.
Elle comporte également un certain nombre d’exceptions :
- Pour une occupation ou utilisation autorisée de courte durée
- Lorsque le nombre d'autorisations disponibles pour l'exercice de l'activité économique projetée n'est pas limité ;
- Lorsque la délivrance du titre d’occupation s'insère dans une opération donnant lieu à une procédure présentant les mêmes caractéristiques que la procédure déterminée par le premier alinéa de l'article L. 2122-1-1 ;
- Lorsque le titre d'occupation est conféré par un contrat de la commande publique ou que sa délivrance s'inscrit dans le cadre d'un montage contractuel ayant, au préalable, donné lieu à une procédure de sélection ;
- Lorsque l'urgence le justifie (la durée du titre ne pouvant dans ce cas excéder un an) ;
- Lorsque le titre a pour seul objet de prolonger une autorisation existante, sans que sa durée totale ne puisse excéder celle prévue à l'article L. 2122-2 ou que cette prolongation excède la durée nécessaire au dénouement, dans des conditions acceptables notamment d'un point de vue économique, des relations entre l'occupant et l'autorité compétente (sans préjudice des dispositions figurant aux 1° à 5° de l'article L. 2122-1-3).
- Lorsqu'une seule personne est en droit d'occuper la dépendance du domaine public en cause ;
- Lorsque le titre est délivré à une personne publique dont la gestion est soumise à la surveillance directe de l'autorité compétente ou à une personne privée sur les activités de laquelle l'autorité compétente est en mesure d'exercer un contrôle étroit ;
- Lorsqu'une première procédure de sélection s'est révélée infructueuse ou qu'une publicité suffisante pour permettre la manifestation d'un intérêt pertinent est demeurée sans réponse ;
- Lorsque les caractéristiques particulières de la dépendance, notamment géographiques, physiques, techniques ou fonctionnelles, ses conditions particulières d'occupation ou d'utilisation, ou les spécificités de son affectation le justifient au regard de l'exercice de l'activité économique projetée ;
- Lorsque des impératifs tenant à l'exercice de l'autorité publique ou à des considérations de sécurité publique le justifient.
A ce jour, les contours des exigences de la procédure de « sélection » de l’article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques restent encore incertains.
On peut sans aucun doute, affirmer qu’a minima, les juridictions administratives devraient exiger le respect des principes de la commande publique.
Les collectivités publiques et leurs établissements publics devront porter une attention particulière à cette réforme, au risque de voir leurs autorisations d’occupation du domaine publique annulées et d’avoir à indemniser les candidats potentiels à de telles autorisations en cas de recours.
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